C’est
l’INSERM – Institut national de la santé et de la recherche médicale qui
l’annonce lui-même ce 14 septembre dernier : le lien entre stress au travail et infarctus est « confirmé » par les diverses études qui ont
pu être menées de 1985 à 2006 en Europe, sur près de 200 000 salariés. Le
journal médical américain The Lancet a mis en ligne la méta-analyse de ces
recherches, qui ont mobilisé des équipes au Royaume-Uni, en Suède, au Danemark,
en Allemagne, en France, en Belgique, en Suisse et aux Pays-Bas. Elle ses sont
réunies dans le consortium IPD-Work, dont l’objectif est « d’obtenir des
informations fiables sur les effets des facteurs psychosociaux liés au travail sur
les maladies chroniques, l’invalidité et la mortalité dans des groups
d’employés spécifiques, comme ceux ayant un bas salaire, une pathologie
pré-existante ou des comportements à risques, de même que ceux ayant un style
de vie sain et une organisation de travail favorable. »
L’objectif de la méta-analyse
dont l’INSERM relaie aujourd’hui les conclusions était donc de reprendre les
données disponibles quant aux liens entre stress au travail et maladies
cardio-vasculaires, et d’harmoniser les résultats en fonction des méthodologies
employées par les diverses équipes. Les chercheurs avaient en effet constitué
des « cohortes » de salariés : en France par exemple, ce sont
près de 20 000 agents d’EDF-GDF qui ont été suivis à partir de 1989, et, en
Belgique l’étude Belstress a suivi plus de 15 000 salariés issus de 24
entreprises différentes.
Dans chaque cas, la proportion
de travailleurs exposés au stress a été définie par questionnaires : il
s’agit donc d’une déclaration volontaire du salarié, qui est invité à estimer
lui-même le degré de stress auquel il est soumis. Les indicateurs utilisés dans
ces questionnaires concernent notamment la quantité de travail, le manque de
temps, les ordres contradictoires, et la liberté de décision. Dans ce cadre, en
moyenne, sur les 200 000 salariés concernés par cette méta-analyse, 15,3%
déclarent être exposés au stress dans le cadre de leur activité professionnelle
–de 13% au Pays-Bas à 22% au Danemark, la France (EDF-GDF) se situant
exactement dans la moyenne à 15%. La prévalence des maladies cardio-vasculaires
a quant à elle été définie par l’étude des admissions dans les hôpitaux et des
registres de décès. Les salariés suivis ont également été catégorisés du point
de vue de leur statut socio-économique, de leur consommation d’alcool et/ou de
tabac, de leur pratique ou non d’une activité physique, et de leur indice de
masse corporelle. La répartition hommes/femmes étaient équitable, et la moyenne
d’âge était de 42,3 ans.
L'une des forces de cette méta-analyse
est qu’elle ne se contente pas de travailler uniquement sur les résultats
publiés : ont également été pris en compte les articles non parus dans la
littérature scientifique, et que les chercheurs avaient conservé en version de
travail. (Sans s’étendre ici sur la question de la publication des résultats
scientifiques, il importe de noter que nombre d’études produites par les
chercheurs restent non publiées : la publication est un marché en soi,
avec ses exigences d’évaluation et ses tendances thématiques du moment)
Ainsi, le lien entre stress au
travail et maladies cardio-vasculaires est confirmé, et se trouve même renforcé lorsque
certaines autres sources de stress apparaissent : du point de vue de
l’activité professionnelle, la perte de l’emploi, et, du point de vue
personnel, la perte d’un enfant ou la maladie du conjoint.
Les auteurs de cette
méta-analyse notent que la réduction du stress au travail (essentiellement défini ici comme un "stress psychologique", dû à "la combinaison
d'une forte demande de travail avec peu de marges de manœuvre") permettrait de
diminuer significativement la prévalence des maladies cardio-vasculaires parmi
les salariés - même si, pour tous les salariés y compris ceux qui ne déclarent
pas souffrir du stress au travail, l'amélioration de l'hygiène de vie est un
facteur essentiel dans la prévention de ces pathologies. En pratique néanmoins,
il n'y a pas là deux aspects indépendants du problème, et la mise en place de
mesures visant à réduire le stress au travail ayant vraisemblablement des effets
positifs sur le comportement individuel des salariés (consommation d'alcool, de
tabac, activité physique).
Crédit photo : PV KS
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